Retrait des ordonnances !

 

Par Michel Le Roc’h, secrétaire général de l’UD CGT-FO de Loire-Atlantique

 

Déclaration de la Commission Administrative de l’Union départementale FO de Loire-Atlantique

Le gouvernement vient de rendre publiques les ordonnances sur la réforme du travail.

Rappelons que dès le départ, le Président de la République a clairement affiché sa volonté de poursuivre l’œuvre de la loi El Khomri :

·         Décentraliser la fixation des règles du droit du travail au niveau des entreprises et faire sauter les verrous du code du travail et des branches afin de permettre aux entreprises d’être « plus réactives, plus flexibles et donc, plus compétitives ».

·         Renvoyer donc à la négociation d’entreprise « tous les sujets fondamentaux qui font les relations de travail » et ainsi donner la primauté aux accords d’entreprise sur les conventions collectives et le code du travail pour l’essentiel des questions liées à la durée du travail, au salaire et aux conditions de travail (inversion de la hiérarchie des normes).

·         Faciliter les licenciements et réduire leur coût.

·         Réduire la place des organisations syndicales pour permettre à l’entreprise de devenir « une communauté de destins entre dirigeants et salariés ».

C’est dans ce contexte de régression annoncée que Force ouvrière a participé tout l’été aux réunions de concertation, en rappelant « aux pouvoirs publics ses analyses, ses revendications et ses lignes rouges, fondées sur la liberté syndicale et le respect des principes républicains » (CE Confédérale du 15 juin 2017).

Dans ce cadre contraint, les négociateurs de la confédération se sont battus, repoussant un certain nombre de dispositions gouvernementales ou patronales (passage du seuil de 10 à 30 pour les PSE, négociations sans syndicat jusqu’à 300 salariés, négociation des CDD dans l’entreprise, renvoi de la prévoyance de la branche à l’entreprise, etc.), préservant le niveau de la négociation de branche dans certains domaines (11 thèmes au lieu de 6 sur lesquels la branche prévaut sur le niveau de l’entreprise) et obtenant le retour du maintien de salaire par l’employeur pour les formations syndicales, ainsi que deux engagements publics de la part du gouvernement : la publication prochaine d’un décret augmentant de 25% les indemnités légales de licenciement et la possibilité sous certaines conditions de désigner un délégué syndical n’ayant pas obtenu 10% aux élections.

Cependant et malgré les concessions faites aux négociateurs Force ouvrière, les 36 mesures inscrites au menu des ordonnances se situent fondamentalement dans le cadre de l’inversion de la hiérarchie des normes et de l’affaiblissement de la place des organisations syndicales.

Pas étonnant dans ces conditions que les organisations patronales applaudissent :

·         Il serait possible d’installer dans les branches des conditions moins favorables que le Code du Travail en matière de recours aux CDD, à l’intérim ou aux contrats de chantier.

·         Il serait possible de discuter et conclure des accords dans les entreprises moins favorables que la convention collective en matière de primes, treizième mois, congés supplémentaires…

·         Pour « répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise », un accord d’entreprise pourrait même baisser les salaires, augmenter la durée du travail et imposer des mutations autoritaires !

·         L’extension des conventions collectives de branche qui permet aujourd’hui de couvrir plus de 90% des salariés pourrait être remise en cause si les pouvoirs publics estiment qu’elle peut porter une « atteinte excessive à la libre concurrence ».

·         Il serait possible de négocier des accords directement avec des élus non syndiqués dans les entreprises de moins de 50 salariés et même dans les moins de 20 de faire « ratifier » directement un accord par les salariés. Ce serait une brèche ouverte au monopole des organisations syndicales à négocier qui date de 1936. Ce serait une attaque directe contre l’existence de confédérations syndicales : « sans syndicalisme libre, pas de démocratie ! ».

·         Il serait possible d’instituer un « conseil d’entreprise », compétent pour négocier, conclure et réviser les conventions et accords d’entreprise. Les propos de la ministre pour qui cette instance unique permettrait « d’évoluer dans une recherche constante de convergence entre l’intérêt des salariés et celui de l’entreprise » montrent bien que l’objectif poursuivi est d’associer les délégués syndicaux aux décisions de l’employeur, de les priver de leur liberté de revendiquer, bref de remettre en cause l’indépendance syndicale pour réaliser l’association capital-travail (corporatisme).

·         Dans la continuité de la loi Rebsamen, CE, DP et CHSCT seraient désormais fusionnés dans toutes les entreprises dans un « comité social et économique » avec probablement moins d’élus pour défendre les salariés, moins de moyens à leur disposition et les mandats seront limités à 3 (sauf accord d’entreprise).

·         Pour faciliter les licenciements économiques, les multinationales ne devraient justifier de « leurs difficultés économiques » que sur le territoire français.

·         Pour faciliter les licenciements individuels, un barème de dommages et intérêts en cas de licenciement abusif serait créé pour permettre aux patrons de provisionner.

·         Enfin, le compte pénibilité qui rencontrait l’opposition du MEDEF serait remplacé par un compte prévention, bien moins favorable.

Dans ces conditions, la confédération Force Ouvrière a annoncé que dans les instances consultatives qui se tiendront dans les quinze jours où seront présentées ces ordonnances, elle votera contre.

La CA de l’UD FO de Loire-Atlantique partage totalement cette position et revendique le retrait des ordonnances dans la continuité de son combat pour l’abrogation de la loi El Khomri.

La CA de l’UD FO de Loire-Atlantique tient également à souligner que les mesures prises se situent dans un ensemble de mesures d’austérité contre les salariés que le gouvernement a décidées et que FO combat : suppressions d’emplois de fonctionnaires, gel du point d’indice, augmentation de la CSG de 1,7 point (avec suppression à terme de toutes les cotisations sociales), remise en cause des APL, mise au chômage de centaines de milliers d’emplois aidés etc…

La CA de l’UD FO de Loire-Atlantique considère qu’il est maintenant nécessaire de préparer les conditions de la mobilisation pour obtenir le retrait des ordonnances et des mesures d’austérité prises ces derniers mois.

La CA de l’UD n’accepte pas la mort sur ordonnance du Code du travail.

 

Adoptée à l’unanimité des 100 participants, membres de la CA et militants présents


vendredi 29 mai 2015

Congrès d’UD

Au congrès de Loire-Atlantique : « Il ne faut pas compter sur nous pour négocier les reculs sociaux »


Michel Le Roc’h a 54 ans. Professeur d’économie et de gestion, secrétaire du syndicat national FO des lycées et Collèges de 1995 à 2005, il occupait le mandat de secrétaire général adjoint à l’Union départementale depuis 10 ans.


Près d’un millier de militants étaient réunis le 22 mai, au parc des expositions de La Beaujoire à Nantes, pour le XXVIe congrès de l’Union départementale de Loire-Atlantique, sous la présidence de Jean-Claude Mailly. Si la journée et la soirée ont naturellement été marquées par le départ de Patrick Hébert, Secrétaire général de l’union départementale depuis vingt-deux

 


ans, qui a passé la main à Michel Le Roc’h, élu à l’unanimité, l’émotion n’a pas détourné les délégués des grandes questions de l’heure.

Le souvenir encore frais de la publication du décret sur la réforme du collège le lendemain même de la grève massive des enseignants pour le retrait de cette réforme, juste deux jours avant le congrès, n’était pas pour calmer les esprits.

 

Plusieurs intervenants ont souligné la difficulté à obtenir de véritables négociations d’une manière générale.

 

Le congrès se tenait également alors que les salariés de la laiterie d’Ancenny étaient en grève depuis cinq jours pour des augmentations de salaires. Un autre délégué a indiqué que la négociation reste bloquée aussi chez Manitou, la direction refusant d’aller au-delà de 1,4% alors que le syndicat revendique 1,8%.

 

Dans ce contexte, la négociation chez Airbus, où, malgré là aussi une pression à la baisse inédite, le syndicat devrait obtenir 2,6% d’augmentation, « représente un point d’appui important pour toutes les autres entreprises de la métallurgie », souligne Michel Le Roc’h.

 

« Quand un accord est bon, nous le signons. Mais le gouvernement et le patronat nous poussent au rapport de forces »

Le nouveau secrétaire général de Loire-Atlantique explique : « Ce congrès s’est inscrit dans la continuité. Nous sommes très attachés à la pratique contractuelle, à la négociation, et quand un accord est bon pour les salariés, nous le signons. Mais aujourd’hui c’est de plus en plus difficile car on nous demande de négocier des reculs sociaux et il ne faut pas compter sur nous pour ça. Le gouvernement et le patronat nous poussent au rapport de forces. Notre raison d’être, c’est l’amélioration des garanties collectives des salariés, pas l’inverse. »

 

La résolution adoptée à l’unanimité des délégués est sans ambages affirmant notamment : « Le congrès se félicite de la mobilisation réalisée à l’occasion de la grève interprofessionnelle du 9 avril dernier, en commun avec la CGT, FSU et Solidaires. Cette journée marque un tournant en ce qu’elle brise le carcan du syndicalisme “rassemblé”. […] Tenter de faire cause commune avec la CFDT et l’UNSA, qui collaborent à la mise en place de tous les plans contre la classe ouvrière et ses acquis, c’est préparer la défaite. Avec Fernand Pelloutier, le congrès réaffirme qu’à “l’unité du nombre, nous préférons l’unité d’aspiration, mille fois plus puissante”. Au “syndicalisme rassemblé”, nous opposons l’action commune, assise sur la préservation des intérêts particuliers des salariés. Dans les conditions d’aggravation continue de la politique d’austérité, il n’y a pas d’autre issue que le recours au rapport de forces en bloquant le pays par la grève. »

 

À la conquête de nouvelles implantations syndicales

Le congrès aura également été marqué par le renouvellement presque pour moitié des instances de l’union départementales, avec l’arrivée de beaucoup de jeunes en remplacement de militants qui ont fait valoir leur droit à la retraite.

 

« Notre objectif est maintenant de nous développer dans des entreprises où nous n’existons pas encore », souligne Michel Le Roc’h. FO, fortement implantée dans de grosses entreprises du département, comme chez Airbus, où elle est majoritaire, ou aux Chantiers navals de Saint-Nazaire, où elle est passée de moins de 5% à 19% en deux scrutins, doit maintenant se développer dans de plus petites entreprises, comme le Crédit agricole ou LU, par exemple. Une commission « développement syndical », qui agira sous l’autorité du bureau de l’union départementale, a d’ailleurs été mise en place.

 

Autre événement marquant de ce congrès, la publication du livre écrit par Jacques Moisan, instituteur FO, édité et imprimé par l’union départementale : Corporatismes d’hier et d’aujourd’hui. Pour l’indépendance syndicale. Une bonne manière de démarrer la campagne que les congressistes ont décidé de lancer contre les tentatives actuelles d’associer les organisations syndicales à la gouvernance économique du pays, le président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone, proposant un nouveau Sénat au sein duquel siégeraient les syndicalistes élus au suffrage universel. Une proposition à des années-lumière des aspirations exprimées à ce congrès.

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